C’est une publication qui est passée un peu inaperçue au beau milieu de cet été, et pourtant ses conclusions sont particulièrement intéressantes.
L’étude de France Stratégie démontrerait en effet que la ségrégation résidentielle en France aurait reculé entre 1990 et 2015 (sauf autour de paris) .
Grâce à un vaste traitement statistique sur 55 unités urbaines de plus de 100 000 habitants les chercheurs montrent que la ségrégation résidentielle n’a pas augmenté durant cette période. Elle aurait même baissé pour les cadres et pour les immigrés d’origine extra-européenne, désormais mieux répartis entre quartiers qu’en 1990 !
Victoire de la mixité sociale, nos villes ne seraient donc pas menacées par la ghettoïsation ou par la gentrification…
Pourtant l’examen plus fin des résultats grâce à l’outil de datavisualisation permet de largement modérer le propos, et même de le contredire.
si on compare par exemple la part des immigrés d’origine extra européenne parmi les 25-54 ans entre 1975 et 2015, on s’aperçoit que celle ci est stable voire augmente dans certaines communes de l’unité urbaine de Lyon, comme à Vénissieux par exemple.
Mais si on descend à un niveau géographique plus petit, au niveau de l’iris (Ilots Regroupés pour l’Information Statistique soit 2000 à 4000 habitants), on s’aperçoit au contraire que la ségrégation augmente !
Si la part des immigrés d’origine extra européenne parmi les 25-54 ans est en moyenne de 14,9 % dans l’unité urbaine, elle est 3,3 fois plus importante dans certains quartiers de Vénissieux, soit 49,17% !
De la même manière, si la loi SRU et les différentes politiques publiques ont bien eu pour conséquence de mieux répartir le logement social sur l’ensemble des communes du pays, le constat est tout autre quand on descend à une maille plus fine.
En 1982, le pourcentage de ménages vivant en logements sociaux était en moyenne de 22% dans l’aire urbaine de Lyon, mais il était de 50,6 à Vénissieux.
En 2015, alors que le pourcentage de ménages vivant en logements sociaux a baissé à 20% sur l’unité urbaine, il est monté à 96% sur un Iris de Vénissieux !
Il nous faut donc relire cette étude en ayant en mémoire que les moyennes nationales ou même au niveau des unités urbaines sont particulièrement trompeuses.
On peut se réjouir que la ségrégation résidentielle en France a globalement reculé. Mais il faut aussi avoir le courage de constater que la ségrégation a considérablement augmenté dans certains quartiers qui se sont en quelque sorte spécialisés dans l’accueil de certain type de population.
La conséquence de cette situation est dramatique pour les collégiens.
Avec la sectorisation, les enfants des quartiers populaires vont dans des collèges de quartiers populaires. La ségrégation urbaine croissante de certains quartiers génère ainsi une ségrégation scolaire croissante.
Il est plus que temps de réagir à cette situation en redessinant les cartes scolaires pour que rapidement les collégiens ne pâtissent plus de cette situation dramatique.
On peut aussi lire l’article que Le Monde a consacré à cette étude.