Un indicateur aveugle

l’Education nationale aime les sigles ? En voilà un nouveau !

Comment classer la population, comment la décrire ?

Avant, il y avait les fameuses CSP, les  catégories socio professionnelles établies par l’Insee en 1954. Depuis 1982 on utilise la nomenclature des professions et catégories socioprofessionnelles dite PCS, mais dans l’ensemble, il s’agit toujours de classer la population selon une synthèse de la profession, de la position hiérarchique et du statut.

L’éducation nationale cherche elle aussi à classer les élèves. Pendant longtemps, elle a utilisé les PCS pour définir 4 groupes d’élèves : très favorisés, favorisés, moyens et défavorisés. Mais cette classification n’était pas assez précise, et c’est ainsi qu’un nouvel indice a vu le jour en 2016 : Lindice de position sociale des élèves (IPS)

C’est un nouvel outil de mesure quantitatif de la situation sociale des élèves face aux apprentissages. Plus l’indice est élevé, plus l’élève évolue dans un contexte familial favorable aux apprentissages. Il est utilisé pour situer les élèves entre eux mais aussi pour décrire les populations scolaires dans les établissements.

En ne se limitant plus aux seuls revenus des parents, mais en prenant en compte leur “capital culturel” cet indice est en effet plus fin pour décrire les “chances” d’un élève de réussir sa scolarité. 

« Une chambre pour toi ? un ordinateur ? une exposition ? Tu iras loin, ma fille… »

On pouvait se douter qu’un élève dont la mère est professeur des écoles et le père ingénieur (IPS de 179) pourrait plus facilement “réussir” ses études que celui éduqué par sa seule mère au chômage (IPS de 38)…

Désormais donc, les collèges sont classés et bénéficient de moyens en fonction de leur IPS.

Mais…

Mais dans la construction de cet indice, si certaines variables ont été retenues (nombre de livres à la maison par exemple), d’autres ont été délibérément ignorées. 

C’est le cas du statut d’immigration.

Selon les statisticiens qui ont construit l’IPS, la situation des parents de l’élève (originaire de France ou d’origine immigrée) n’aurait que peu d’influence sur les résultats scolaires*. 

Et c’est ainsi que ce nouvel indicateur de l’Education nationale, savamment élaboré et sans aucun doute particulièrement efficace pour mesurer la performance scolaire des élèves ne permettra pas du tout de mesurer la mixité d’origine de la population scolaire d’un collège !

beaucoup de chiffres et de graphiques…

Mais qui pourra croire qu’un établissement accueillant plus de 80% de collégiens dont les 2 parents sont nés en dehors de l’Europe produira la même expérience éducative qu’un collèges où 80% des collégiens ont des parents nés en France métropolitaine, quand bien même ces établissements présentent exactement le même IPS ?

Car une scolarité ne peut être résumée en une simple « performance scolaire ». La scolarisation, c’est avant tout une socialisation, et ne pas considérer que les conditions de celle-ci puissent avoir une importance dans la manière dont se construisent les futurs citoyens est une grave erreur.

Il y a là une incroyable hypocrisie que d’utiliser un indicateur aveugle sur l’origine des élèves alors même que le président de la République reconnaît que “nous avons concentré les populations souvent en fonction de leurs origines” et que “nous avons nous-mêmes construit notre propre séparatisme. C’est celui de nos quartiers”.

C’est la raison pour laquelle nous demandons qu’un nouvel indice puisse être utilisé pour mesurer la réalité sociologique des collégiens : Un indice de mixité sociale et d’origine.

L’IPS est aveugle, donnons à voir l’IMSO !

*construction d’un indice de position sociale des élèves- Thierry Rocher – MENESR – SEPP, page 12

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